10.06.2007

118. Léon Tolstoï : "Le pays de Clarens".

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Au lendemain de la guerre de Crimée et des massacres de Sébastopol, Tolstoï (1828-1910) passe deux mois à Clarens. Il écrit à l'une de ses tantes :

« Je n’essaierai pas de vous décrire la beauté de ce pays, surtout en ce moment, quant tout est en feuilles et en fleurs. Je vous dirai seulement qu’à la lettre il est impossible de sa détacher de ce lac et de ses rivages, et que je passe la plus grande partie de mon temps à regarder et à admirer en me promenant, ou bien en me mettant à la fenêtre de ma chambre »
Temps clair et bleu. Le Léman bleu vif, avec les points blancs et noirs des voiles et des barques, brillait presque de trois côtés à nos yeux. Près de Genève, dans le lointain du lac, l’air chaud tremblait et s’obscurcissait. Au côté opposé s’élevaient, droites, les vertes montagnes de la Savoie. A gauche, au dessus des vignes, dans les bosquets vert sombre des jardins fruitiers, Montreux se profilait nettement avec sa gracieuse église attachée à la pente. On voyait Villeneuve au bord même, avec ses toits de fer brillant au soleil ; la profonde et mystérieuse vallée avec des montagnes entassées les unes sur les autres ; le blanc et froid Chillon, sur l’eau même, et la petit île qui se dresse joliment en face de Villeneuve. Le lac frissonne à peine. Le soleil frappe perpendiculairement sa surface bleue et les voiles déployées semblent immobiles.