4.23.2007

108. M. le Gallais : "Origines de la Savoie"

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Les Savoyards sont pauvres; mais leur dévouement et leur bravoure sont au-dessus de tout éloge; quand ils ont gagné à l'étranger un petit pécule, ils reviennent au sein de leurs montagnes, tout prêt à donner leur sang pour la dynastie de Savoie. [...]. Quand vint l'instant des luttes solennelles entre Rome et la Gaule les Allobroges se retrouvèrent à leur poste et prirent à cette grande guerre une part glorieuse. Fidèles jusqu'à la fin, ils se joignirent à l'armée d'Annibal. Puis vint pour eux, comme pour toute l'Europe, l’heure de la conquète. L’an 632 de Rome - 122 ans avant JC - le consul Domitius Aenobarbus pénétra au sein de leurs montagnes. Après lui, Fabius Maximus acheva de soumettre le pays, et crut avoir assez fait pour mériter la gloire, car il prit le nom d'Allobrogique. Les Alpes Grecques - Alpes Graiœ, c'était alors le nom de la Savoie - furent, avec une partie de la Gaule, incorporées dans la Narbonnaise ou Provence, la première province romaine. Vers l'extrémité nord-est, sur les bords du lac Léman, dans la région qu'avaient habitée des peuplades que César nomme les Andates ou Nandates, les Romains établirent des haras. Cette région prit alors le nom de « provincia equestris » ou Caballica, d'où, par corruption, le Chablais qui a pour capitale Thonon. [...] Tant que dure l'empire romain, la Savoie n’a pas d'histoire. Lors de la division de la Gaule en provinces, elle fait partie de la Viennoise. (page 32, 33)

107. A. de Bougy : "Les eaux minérales d'Evian".

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Je suis porté à croire que les eaux d'Evian ont été appréciées et recherchées de toute antiquité, soit d’après le témoignage du nom latin d’Aquianum, soit d'après l'extrait du manuscrit de François Prévost où il est parlé de ces fort bonnes eaux, de ces douces, belles et amples fontaines sortant et ruisselant en tous les endroits, au grand contentement el soulagement de tous. A ceux qui douteraient de la réalité du nom d'Aquianum ou qui n'accepteraient cette dénomination que comme un produit de la latinité du moyen âge, nous dirons qu'ils ne peuvent nier que les eaux n'eussent déjà un certain renom en 1622. [...] L'avertissement placé en tête de l'Album du marquis de Lucinge-Féterne dit ceci : « Les eaux d'Evian réunissent tous les ans un assez grand nombre d'étrangers de distinction; leur salubrité et la beauté du pays qui les ont rendues célèbres, font de la petite ville d'Evian un lieu très-amusant pendant le temps que l’on boit ces eaux: bals, spectacles, académies de jeux, tout se réunit alors, et ces plaisirs y auraient peut-être plus de monde en sauté que les eaux de personnes incommodées » .
A cette époque, on se rendait à Evian surtout pour boire de l'eau de la source minérale ferrugineuse d'Amphyon, située à une demi-lieue de la ville, Cet endroit recevait de hauts et puissants personnages, des lords, des grands seigneurs français, la famille royale de Sardaigne, dont la duchesse du Chablais faisait partie. Aujourd'hui les eaux d'Evian sont bien plus fréquemment employées que celles d'Amphyon et de la Grande-Rive. On jouit à Evian, dit avec raison Grillet de la plus parfaite santé, à cause de la salubrité de l'air et de l'excellence des eaux qui abondent dans toutes les parties de la ville. » On sait que ces eaux sont employées avec succès dans les affections des muqueuses, des voies digestives, contre la goutte, la pierre. [...] Les précieuses propriétés des eaux minérales d'Evian furent mises en évidence par le marquis de Lessert d'Auvergne, qui, ayant par hasard bu à la source, se trouva en peu de temps guéri d'une maladie qui le tourmentait depuis quinze ans. Ainsi, on commença à s'occuper sérieusement de l'eau de Cachat nom du propriétaire d'alors. (page 13, 14)

106. L.E. Piccard : "Origines d'Evian"

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Evian, l’ancienne métropole du pays de Gavot, est la seconde ville du Chablais. Assise dans la contrée la plus délicieuse et la plus enchantée que l’on puisse imaginer, elle tire son nom et sa célébrité de ses eaux minérales, et s’élève en amphithéâtre comme pour se mirer dans la limpidité de son lac. Située sur la route romaine reliant l’Alpe Pennine à Genève, elle fut certainement connue des maîtres du monde qui recherchaient, comme on le sait, avec un soin jaloux, les stations thermales, dans toute l’étendue de leur vaste empire.
Son nom, Evian, du celtique Eva "eau", nous dit assez que son origine se perd dans la nuit des temps ; les Romains le traduisirent par "Aquianum". [...] Dès le treizième siècle, elle possède son château, ses tours, dont plusieurs subsistent encore, ses murs et ses fossés. Pierre le Petit-Charlemagne éleva ou releva ses fortifications en y construisant en 1237 une forteresse et château à quatre grandes tours. Mais les guerres qui désolèrent le pays à diverses époques, et surtout les luttes sans cesse renaissantes des Comtes de Savoie contre les dauphins de Viennois et les comtes de Genevois, nécessitèrent d'importants travaux de défense qu'exécutèrent les Comtes Amédée V et Amédée VI. [...] Le comte Pierre donna à Evian son code municipal, en 1265, en la déclarant franche et libre. Elle obtint alors le droit de navage, soit de transporter seule les marchandises par le lac. Le comte Philippe, Amédée V, Edouard, Bonne de Bourbon, les Valaisans, récompensèrent tour à tour la fidélité des Evianais en confirmant ou en augmentant leurs antiques franchises ou privilèges. En 1536, lors de l’occupation du Bas-Chablais par les Bernois, les habitants du pays de Gavot appelèrent les Valaisans, qui firent d’Evian le chef-lieu de trois districts qu’ils y établirent. (page 15, 16)

105. Martine de Rosny-Farge : "La petite fille du lac".3/3.

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Ces années-là, la rive d'en face disparaissait sous de lourds nuages effilochés qui traînaient sur la surface du lac d'un gris plombé. L'eau ne s'éclairait que par intermittence. Quelquefois le soleil traversait la masse nuageuse, ce qui m évoquait les images du catéchisme sur lesquelles Dieu était représenté par des rayons lumineux. Mais cette première fois, le lac n'était que merveille bleutée. […] Le port de Nernier, le plus vaste du Léman, avait été conçu au XIXe siècle pour abriter les superbes barques de Meillerie. Ces larges voiliers plats surmontés de deux mâts courbés étaient destinés au transport des pierres, des rochers et des matériaux de construction.
Dans mon enfance, deux barques de Meillerie étaient encore en activité, sillonnant le lac, été comme hiver. Leurs grandes voiles latines, triangles blancs et lumineux gonflés par le vent, s'élançaient à l'assaut du firmament, plus hautes que des maisons. Par vent arrière, les barques ressemblaient à de gigantesques papillons. Nous aimions les voir apparaître au loin, royales et tranquilles. Nous nous précipitions sur le balcon ou sur le port pour les admirer. Puis nous retournions à nos occupations, qu'elles accompagnaient de leur lente progression.
A cette époque, le port presque vide nous semblait immense. Durant la guerre, le Léman avait été fermé à la navigation et son eau était aussi limpide que celle d'un lac de montagne. La pénurie d'essence avait immobilisé les moteurs. Grâce à l'absence de pollution, l'air était léger et transparent.
Le bras droit du port, une jetée piétonnière, était bordé d'un muret contre les vents de nord-est. Il n'a pas changé. Son bras gauche arrondi, simple empilement de rochers, terminé par un môle, le protégeait des vents de sud-ouest.
La première fois que j'ai surgi sur le balcon, c'est surtout vers cette barre rocheuse que mon regard fut attiré. Isolée de la terre, elle était couverte de mouettes et semblait un domaine sauvage, sorte d'île mystérieuse, accessible aux seuls oiseaux. Elle frémissait de leur vie. Une mouette s'envolait du troupeau en piaillant, une autre atterrissait et, quelquefois sans raison apparente, le groupe tout entier s'élevait comme une grande . (La petite fille du lac - Souvenirs lémaniques)

104. Martine de Rosny-Farge : "La petite fille du Lac". 2/3.

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Les adultes nous ont rejoints à la glissière. Ils ont continué vers la maison. Nous les avons suivis en ribambelle. Le soleil du matin colorait les arbres des jardins de sa vivacité légère. Dans la ruelle, des enfants nous regardaient avec curiosité.
Nous allions grandir ensemble chaque été, et jusqu'à l'âge adulte, partager joies enfantines et émois d'adolescents.
Nous avons escaladé un escalier paysan en bois. Nous nous sommes enfilés dans un couloir un peu mystérieux. La porte du fond s'est ouverte sur une grande pièce.
Sans s'arrêter, le premier arrivant a traversé la salle. Il a ouvert une porte-fenêtre. Une délicieuse bouffée d'air frais a coulé sur mon visage fatigué, comme une invitation. Je l'ai suivi. Et j'ai surgi sur le balcon ...
Le lac était là, omniprésent. J'ai eu la surprise de constater que le mur de la maison s'enfonçait dans une eau chatoyante qui caressait la pierre de son robuste clapot. La maison était dans l'eau. Deux jetées arrondies enserraient l'intérieur du port de leurs bras protecteurs. Quelques bateaux s'y balançaient doucement. Au-delà de cette eau tranquille, le lac prenait son essor, comme une sorte d'infini. En face, très loin, tamisée par la brume de beau temps, on apercevait l'autre rive. On y devinait une petite ville dont les maisons se confondaient avec la ligne mouvante de l'eau bleue. Au-dessus, comme une autre ligne parallèle d'un bleu plus clair, des montagnes se perdaient dans le bleu rosé du ciel et la blancheur pommelée des nuages.
Le Léman n'allait pas toujours être aussi agréable. Dans les années cinquante, plusieurs saisons pluvieuses nous contraignirent à rester dans les maisons, à jouer aux cartes, à «l'assassin» dans la grande pièce du haut. La pluie tombait inexorablement et les platanes coulaient comme des gouttières. (La petite fille du lac - Souvenirs lémaniques)

103. Martine de Rosny-Farge : "La petite fille du lac". 1/3.


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Pendant les cinq années de guerre, la ligne de démarcation avait coupé la France en deux, et nous avions passé les étés chez nos grands-parents. La paix revenue, ma famille retrouvait le chemin du village. A six ans, c'était pour moi la première fois.
Nous avions dormi dans le train. Emergent le souvenir du bruit, ta-pi-top, ta-pi-top, des escarbilles qui nous laissaient des traînées noires sur la peau, du va-et-vient des fils électriques qui semblaient mener une danse incessante de corde à sauter. Au petit matin nous avions pris le car. Après maints tournicotages, nous nous étions enfin arrêtés au centre du village, saouls de bruits et de mouvements. […] C'est alors que j'ai vu le lac. Je me souviens de cette eau comme si c'était ce matin ...
Je me souviens de sa transparence, de sa fluidité, du petit clapot, de sa chanson frisottée qui caressait le sable, de cette lumière à la fois bleue et rose qui éclairait doucement les pierres dans une atmosphère un peu verte et rafraîchissante. Habituée à l'Oise, la transparence de cette eau, sa limpidité dorée laissait naître en moi d'imprévisibles possibilités. L'Oise plus glauque, au courant irrésistible, était dangereuse. Cette eau-là ne demandait qu'à se laisser apprivoiser. Je l'ai touchée, tout doucement.
Un gros poisson blanc flottait près de la glissière. Mes frères et moi avons poussé des cris d'admiration. Nous nous apprêtions à le saisir lorsqu'une grande fille rieuse, qui allait devenir notre belle-sœur, s'est moquée de nous.
- Pouah! Il est crevé!
Son rire me laissa perplexe. Il était mort, ventre en l'air... Et alors? La guerre et les bombardements nous avaient familiarisés avec la destruction. Ce jour-là j 'ai eu l'impression que la vie gagnerait. Le poisson flottait, allait se décomposer. Mais cette eau resterait vivante, source de plaisir et de découvertes. J'ai levé les yeux, regardé plus loin. L'eau était partout.
Aujourd'hui, ces souvenirs m'étonnent. Avant d'atteindre le portail, nous nous trouvions dans un jardin ami, en terrasse sur le lac. Il est impossible que nous ne nous soyons pas approchés de l'eau pendant que les adultes se retrouvaient après six ans de séparation. Et pourtant, c'est seulement sur la glissière à bateau, à l'intérieur du port que j'ai lié amitié avec le Léman. Dans ce modeste coin de village est née une affection frémissante et forte. Sur la terrasse, j'étais chez les autres. Ici c'était la liberté. J'avais deviné que je pourrais y mener toutes sortes d'aventures enfantines sous le regard bienveillant et discret des villageois. Le monde s'était dilaté. Encore maintenant, il me semble que c'est à l'aune de cet instant que je mesure mes joies.
C'est peut-être pourquoi je veux décrire le village, et raconter ce que furent ces êtres qui ont entouré mes vacances d'enfant. Et je le ferai avec mes yeux d'alors, avec les impressions qui furent les miennes, transformées en souvenirs inséparables de toutes les années écoulées depuis, avec le lac pour toile de fond comme une sorte de personnage principal.
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Editions Cabédita CH-1137 Yens sur Morges
Internet :
www.cabedita.ch

102. Michel Boutron : "La montagne et ses hommes". 2/2.

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A cette véritable première expérience montagnarde, à l'âge où aucun de mes gestes, de mes actes n'était entièrement délivré de la tutelle familiale, exonéré d'une emprise qui me pesait, je veux en ajouter une autre. Celle-là, où libre de tout frein, où maître de mes seules ressources, je me suis mis en marche, où je suis parti en pèlerinage au temple de la suprême beauté et sagesse. Ce temple, je l'avais situé au centre de cette Suisse qui, pour moi, était la banque des montagnes, comme pour d'autres elle est celle de l'or. Ce temple avait nom Zermatt; l'objet sacré que l'on montait vénérer portait le nom tantôt de Cervin, tantôt de Matterhorn. Je l'avais contemplé en image, il était épinglé sur un mur de ma chambre, on le retrouvait aussi entre les pages d'un de mes derniers cahiers, je savais sa perfection. Je savais comment le joindre, le long de ce Léman, près de cette Dent d'Oche qui avait connu mes tout premiers émois, puis remonter le Rhône qui fait, en coulant, se courber les hauts peupliers valaisans, chers à Rilke. (La Montagne et ses hommes)
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Source de l'illustration : La Dent d'Oche : http://www.geocities.com/romrando/marche.htm

101. Michel Boutron : "La montagne et ses hommes". 1/2.

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Après, ce fut la Suisse, la Suisse véritable, ou plutôt la Suisse vue d'en face, de l'autre côté d'un lac prévu tout exprès pour refléter ses neiges et ses rochers, et ses pâturages et ses vignes. Cette fois, j'étais pris, ensorcelé, il y en avait de trop, jamais je ne pourrais tout goûter, absorber, digérer. J'en aurais pour la vie entière; il me faudrait revenir, aller ailleurs vers des sommets à peine entrevus derrière d'autres sommets plus proches, les gravir parfois, mais surtout contempler.
Contempler, le grand mot jeté qui est l'achèvement de l'œuvre, la véritable raison d'être de l'œuvre; je pense à ce sculpteur assez pur, assez innocent, qui n'a pas peur d'être ébloui par ce qu'il vient d'achever. Contempler, n'est-ce pas la véritable vocation des montagnes, objet et sujet de contemplation? Leur vie, la vie des montagnes ne peut se concevoir sans une grande part de contemplation, un réfléchissement, comme celui que portait ce lac Léman de mon enfance. Le jour, réfléchissement des sommets et des nuages sur les eaux vibrantes de perches et d'ablettes, la nuit, celui des villages et des villes mêlés à la doublement vivante pérégrination des mondes stellaires.
C'est dans un grand concours d'éblouissements et de menues expériences qu'eurent lieu mes fiançailles avec la montagne. Ce fut la Dent d'Oche où mes dix ans firent merveille, où je découvris la volupté de se pencher sur les eaux cascadantes, comme pour boire à la nature tout entière. Ce fut là aussi que dans un creux de haute prairie, je plongeai mes mains dans un trésor de cristaux glacés que le soleil d'août n'arrivait pas à dilapider. (La Montagne et ses hommes)

4.02.2007

100. Anna de Noailles : "Deux êtres luttent . . ."


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Deux êtres luttent dans mon coeur,
C'est la bacchante avec la nonne,
L'une est simplement toute bonne,
L'autre, ivre de vie et de pleurs.

[...] Pourtant, chaque soir, dans mon coeur,
Cette sage et cette furie
Se rapprochent comme deux soeurs
Qui foulent la même prairie.

Toute deux lèvent vers les cieux
Leur noble regard qui contemple.
L'étonnement silencieux
De leurs deux âmes fuse ensemble;

Leurs front graves sont réunis;
La même angoisse les visite:
Toutes les deux ont, sans limite,
La tristesse de l'infini! ...
(ouvrage cité)

Balcon de l'Hôtel de Ville d'Evian : "Le Penseur"

99. Anna de Noailles : "Astres qui regardez".

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Astres qui regardez les mondes où nous sommes,
Pure armée au repos dans la hauteur des cieux,
Campement éternel, léger, silencieux,
Que pensez-vous de voir s'anéantir les hommes?
A n'être pas sublime aucun ne condescend,
Comme un cri vers la nue on voit jaillir leur sang
Qui, sur nos coeurs contrits, lentement se rabaisse.
Morts sacrés, portez-nous un plausible secours!
Notre douleur n'est pas la soeur de votre ivresse;
Vous mourez !
Concevez que c'est un poids trop lourd
Pour ceux qui, dans leur grave et brûlante tristesse,
Ont toujours confondu la vie avec l'amour...

in "Les Forces Eternelles" Juin 1815
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Au cimetière du Père Lachaise à Paris, la chapelle
de la famille Bibesco-Brancovan, dans laquelle est inhumée Anna de Noailles.

98. François Broche : "Anna de Noailles".

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"D'un seul soupir d'amour vit et meurt la fusée ... " Cocteau écrivant ce vers pensait peut-être à Anna de Noailles : fusée, feu d'artifice, comète, elle a étincelé, illuminé, ébloui le temps qu'elle a traversé. Morte à cinquante-sept ans, en 1933, elle est entrée d'un coup dans une nuit d'oubli aussi noire qu'injuste.
Petite fille riche, heureuse, surdouée, jeune femme com­blée, elle faisait crier au génie, ses mots d'esprit couraient Paris, les éditeurs s'arrachaient ses poèmes et ses romans, les salons se disputaient sa présence.
Loti et Mauriac, Briand et Clemenceau, Proust et Mangin, Cocteau, Jean Rostand ... Maurice Chevalier même, elle les a tous fascinés. Et Maurice Barrès avant tous: mystérieuse ren­contre de deux destins qui s'attirent et qu'une tragédie éloi­gnera.
C'est qu'Anna de Noailles était elle-même "un mystère en pleine lumière". Aristocrate et dreyfusarde, humble et impé­rieuse, bavarde intarissable et secrète, vulnérable et cruelle, dévorée par le goût de vivre et hantée par la mort.
On l'a encensée. On l'a déchirée. François Broche approche tous ces mystères à pas de velours. Il sait tout, mais sa biographie est plus qu'une biographie: comme la musique de Mozart, comme la poésie d'Anna de Noailles, le silence qui suit, c'est encore de la musique, encore de la poésie.

97. Anna de Noailles : "Les Vivants et les Morts". 1913.

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96. Anna de Noailles : "Domination" 2.

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95. Anna de Noailles : "Domination" 1

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Publié en 1905

94. Anna de Noailles "Poème de l'amour".

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1924