2.04.2008

211. Les barques du Léman et la voile latine

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Les barques de Meillerie, en 1912
(collection personnelle de François MARMOUD que je remercie)

1. Les études d’archéologie lacustre portant sur l’histoire des bateaux du Léman, montrent la coexistence de deux familles de navires : le bateau à fond plat, navis et la barque sur quille, galea, inspirés des galères militaires et marchandes méditerranéennes. La batellerie lémanique tire profit des experts en construction navale que sont les Vénitiens, Génois, Niçois et Provençaux que l’on retrouve sur les côtes du Léman dès la fin du XIIIème siècle. Invités par les ducs de Savoie - les Bernois, Valaisans et Genevois - à construire des navires leur permettant d’assurer leur empire commercial et politique, ils stimulent l’évolution architecturale de la flotte lacustre. À la fin du XVème siècle, période de troubles politiques et religieux, il devient nécessaire de posséder des embarcations rapides et sûres. Des bateaux inspirés des navires marchands méditerranéens, de la famille des galères, apparaissent alors. Quant à la voile latine, elle est importée en Suisse à la fin du XVIème siècle par un constructeur vénitien. Ces « barques » constituent donc les ancêtres de la barque du Léman – inventée à Genève au cours du XVIème siècle – et dont l’évolution architecturale aboutit à un navire de transport particulièrement bien adapté au contexte lacustre
2. La voile latine, c'est peut-être la plus ancienne de toutes les voiles auriques du monde ; on en connaît des représentations précises sur des manuscrits Byzantins du IXème siècle, elle y est exactement semblable à certaines de celles que nous avons connues jusqu'à aujourd'hui. C'est la voile de la mer latine : C'est à dire de la méditerranée occidentale. C'est la voile des Italiens, des Provençaux, des Espagnols, des Portugais et aussi des Maghrébins. C'est la voile des galères, des tartanes, des felouques et des chébecs.
La voile latine a joué un rôle primordial dans l'histoire des techniques de la voile, c'est elle qui est à l'origine de toutes les voiles axiales modernes : celles des sloops, celles des cotres, et plus près de nous celles des planches à voile dernières nées des inventions véliques occidentales.
Voile triangulaire ou quadrangulaire qui fonctionne indifféremment en recevant le vent, selon le côté d'où il souffle, sur sa face tribord ou bâbord mais dont la chute, côté vertical, avant est toujours au vent et sa chute arrière toujours sous le vent
Voile triangulaire et enverguée sur une antenne, c'est une voilure très commune en Méditerranée, ce qui explique aisément son appellation. De ce groupement nous retrouvons le Foc (du néerlandais Fok), dont nul n'ignore la forme. Il existe également le Grand Foc qui se hisse à la tête du petit mât de hune ; le Foc d'Artimon (du grec Artemo) s'installant entre le grand mât et le mât d'artimon. En Suisse, c'est aux bernois et à leur goût affirmé pour l'économie que le Léman doit ses merveilleuses barques de commerce à voile latine.
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A lire : Bernard SACHE : "Meillerie où les cailloux de la gloire" (voir 212)