3.06.2007

34. Charles Ferdinand Ramuz : "Le chant de notre Rhône". 1/4.

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"Là-bas, le Rhône naît du glacier : voilà d'abord son origine. C'est cette grande vallée pierreuse, avec un versant privé de sa chair sous une peau peinte et repeinte, cuite et recuite par le soleil, où si souvent on s'est tenu, à l'ombre de l'un ou l'autre de ces pins qu'il y a, l'ombrelle des branches mal ouverte et un peu de travers, en peinture vert foncé sur une peinture bleu foncé ; et on l'a contemplé de là, dans le fond de cette vallée, quand il coulait encore blanc comme sont les eaux du glacier qui sont des eaux comme du lait. Sur ce fond plat était la route, sur ce fond plat était la véritable route, sur ce fond plat était la voie ferrée ; sur ce fond plat était cette autre fausse route, plus large, plus tortueuse, avec ses volontés, beaucoup plus large, avec ses fantaisies, prenant en travers de la plaine tout à coup, puis faisant un détour, puis de nouveau serrée tout contre la montagne, comme si elle cherchait l'ombre, puis de nouveau allant droit devant soi. Ferdinand RAMUZ (1878-1947), Le chant de notre Rhône