2.01.2008

209. Alphonse Guillot : "Une fête à Evian".

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A quelques minutes d'ici, sur une esplanade naturelle, existe encore un magnifique bois de châtaigniers, qui fut au XVIIème siècle le rendez-vous favori de la société élégante qui fréquentait les eaux de la contrée durant la saison. Un auteur a décrit ces fêtes en ces termes (Congrès des Sociétés savantes, Evian) :
"Dans l'après-midi, une longue file de chars dorés sur une longueur d'une lieue et demie conduit le sexe le plus brillant en promenades sur les bords du lac, les femmes se reposent sous les châtaigniers du bois de Blonay et des peintres empressés fixent sur la toile les scènes les plus tendres. La musique fait entendre des notes harmonieuses. Pan, au son de sa flûte, éveille les nymphes des eaux et les sylvains de la Forêt ; les hommes de service dressent les tables avec des fruits délicieux, du champagne et du bourgogne, qu'on déguste entre deux danses.
Un amant alors s'enfonce en secret avec son amante dans les allées ombreuses du parc pour goûter la «solitude, le charme de cet asile enchanteur.
La fête finie, les voitures reprennent la route d'Evian et d'Amphion, escortées au loin par les bateaux enguirlandés qui voguent sur le lac cependant qu'une troupe d'artistes fait entendre les mélodies d'une «fanfare de hautbois. [...]
Musique légère, gavottes et menuets, robes de soie à paniers, qui à la contredanse saviez découvrir le pied et laisser deviner la jambe, chapeaux bergère qui ombriez les yeux et donniez plus de douceur au regard, rubans Fontanges ou Pompadour qui flottiez au vent, dentelles d'Alençon ou de Malines qui couvriez ou découvriez les épaules, parfums d'ambre et d'iris, d'oeillet et de jasmin, coeurs sensibles, belles et tendres amoureuses, qu'êtes-vous devenus ?
Les décades ont passé comme les hivers qui neigent sur nos fronts. Donnons-leur ce souvenir et souhaitons que les violons de Lulli et de Mozart se fassent toujours entendre. (Alphonse Guillot, opus cité, page 57)