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3. Je m'aperçois non sans suffisance en relisant cette page, qu'elle ressemble honnêtement à une foule de notices que j'ai lues partout, et encouragé par un résultat si flatteur, je vais aborder Évian avec plus d'assurance ou de présomption, et si je vous parodie avec trop de maladresse, c'est à vous que je m'en prendrai.
« Le succès d’Evian n'est plus en question; mais que d'améliorations réclame un séjour agréable déjà, et qu'il serait si aisé de rendre délicieux ! C'est une vieille cité dépourvue de quai et dont les murs viennent se mirer dans le lac. L'église s'avance dans l'eau comme la carène d'un vaisseau amiral; disposition précieuse pour les peintres, mais qui n'a pas d'autre avantage. Il faudrait approprier aux conditions des résidences thermales une ville construite avant qu'on ait songé. à utiliser les cinq sources, récemment découvertes, qui ont valu à la petite capitale du Jardin de la Savoie une faveur européenne, et qui l'enrichiront un jour.
Tout y avait été combiné pour la défense d'un pays menacé. Trois châteaux, Blonay, Fonbonne, Gribaldi, interceptent les abords du lac. Reliés aux murs crénelés de la cité, ils retranchaient sous leur abri quelques couvents sévèrement enclos. La principale rue, parallèle au rivage, a donc été portée assez haut, et comme le terrain descend par une pente rapide, on a dû la percer étroite et en aligner les hautes maisons dans les espaces praticables. D'où il suit que la perspective du Léman est masquée aux habitants, à moins qu'ils ne gravissent le coteau qui plonge sur la ville. Ce n'est pas avant 1824 que l'on a organisé au milieu de cette voie, sur un terrassement, un premier établissement de bains dont l'accès est loin d'être agréable. Les eaux d'Évian avaient été pourtant découvertes dès l'an 1789, par un gentilhomme de l'Auvergne, le marquis de Lessert. Il est même singulier qu'on ne les ait pas plutôt reconnues, puisque, plus de soixante ans auparavant, la cour de Sardaigne venait chaque année prendre gîte au château de Blonay, afin d'être à portée des eaux d'Amphion, qui malheureusement, appartiennent à l'hospice d'Évian peu en état de les remettre en honneur.
C'est lors d'un de ces voyages, en 1726, que Mme de Warens, étant venue de Vevey pour voir les princes et la cour de Turin, assista à un sermon de l'évêque Rossillon de Bernex et voulut abjurer le protestantisme. Son dessein causa une émeute: les gens de Vevey ayant menacé d'incendier Évian pour enlever cette beauté au milieu de la cour, Victor-Amédée II, dont elle invoqua la protection, la fit conduire à Annecy par quarante gardes.
Si les sources médicales d'Évian avaient été connues alors, il n'est pas douteux que des princes qui aimaient ce peuple fidèle, n'eussent fait quelques efforts pour les mettre en lumière. Que faut-il donc penser de la légende si populaire aujourd'hui, du bon ermite de Neuvecelle ! Voulez-vous que je vous la raconte?
En 1480 (la date est précise), un baron de la Rochette avait une fille qui s'éprit d'un simple écuyer. Il n'osait aspirer à une telle alliance, lorsque le père de son amie étant tombé malade et désespérant de guérir, promit la main de Béatrix à qui pourrait le sauver. L'amant, désolé d'avoir à redouter comme rivaux, outre les seigneurs du voisinage, la corporation des apothicaires, errait dans la campagne, lorsque, au-dessus d'Évian, il reçut l'hospitalité d'un vieil ermite qui s'était construit une cellule dans un châtaignier. Le compatissant solitaire révéla à l'écuyer le secret de la source, dont seul il connaissait la vertu; le vieux baron fut guéri de la gravelle, et l'écuyer du mal d'amour par la panacée du mariage.
« Le succès d’Evian n'est plus en question; mais que d'améliorations réclame un séjour agréable déjà, et qu'il serait si aisé de rendre délicieux ! C'est une vieille cité dépourvue de quai et dont les murs viennent se mirer dans le lac. L'église s'avance dans l'eau comme la carène d'un vaisseau amiral; disposition précieuse pour les peintres, mais qui n'a pas d'autre avantage. Il faudrait approprier aux conditions des résidences thermales une ville construite avant qu'on ait songé. à utiliser les cinq sources, récemment découvertes, qui ont valu à la petite capitale du Jardin de la Savoie une faveur européenne, et qui l'enrichiront un jour.
Tout y avait été combiné pour la défense d'un pays menacé. Trois châteaux, Blonay, Fonbonne, Gribaldi, interceptent les abords du lac. Reliés aux murs crénelés de la cité, ils retranchaient sous leur abri quelques couvents sévèrement enclos. La principale rue, parallèle au rivage, a donc été portée assez haut, et comme le terrain descend par une pente rapide, on a dû la percer étroite et en aligner les hautes maisons dans les espaces praticables. D'où il suit que la perspective du Léman est masquée aux habitants, à moins qu'ils ne gravissent le coteau qui plonge sur la ville. Ce n'est pas avant 1824 que l'on a organisé au milieu de cette voie, sur un terrassement, un premier établissement de bains dont l'accès est loin d'être agréable. Les eaux d'Évian avaient été pourtant découvertes dès l'an 1789, par un gentilhomme de l'Auvergne, le marquis de Lessert. Il est même singulier qu'on ne les ait pas plutôt reconnues, puisque, plus de soixante ans auparavant, la cour de Sardaigne venait chaque année prendre gîte au château de Blonay, afin d'être à portée des eaux d'Amphion, qui malheureusement, appartiennent à l'hospice d'Évian peu en état de les remettre en honneur.
C'est lors d'un de ces voyages, en 1726, que Mme de Warens, étant venue de Vevey pour voir les princes et la cour de Turin, assista à un sermon de l'évêque Rossillon de Bernex et voulut abjurer le protestantisme. Son dessein causa une émeute: les gens de Vevey ayant menacé d'incendier Évian pour enlever cette beauté au milieu de la cour, Victor-Amédée II, dont elle invoqua la protection, la fit conduire à Annecy par quarante gardes.
Si les sources médicales d'Évian avaient été connues alors, il n'est pas douteux que des princes qui aimaient ce peuple fidèle, n'eussent fait quelques efforts pour les mettre en lumière. Que faut-il donc penser de la légende si populaire aujourd'hui, du bon ermite de Neuvecelle ! Voulez-vous que je vous la raconte?
En 1480 (la date est précise), un baron de la Rochette avait une fille qui s'éprit d'un simple écuyer. Il n'osait aspirer à une telle alliance, lorsque le père de son amie étant tombé malade et désespérant de guérir, promit la main de Béatrix à qui pourrait le sauver. L'amant, désolé d'avoir à redouter comme rivaux, outre les seigneurs du voisinage, la corporation des apothicaires, errait dans la campagne, lorsque, au-dessus d'Évian, il reçut l'hospitalité d'un vieil ermite qui s'était construit une cellule dans un châtaignier. Le compatissant solitaire révéla à l'écuyer le secret de la source, dont seul il connaissait la vertu; le vieux baron fut guéri de la gravelle, et l'écuyer du mal d'amour par la panacée du mariage.