3.06.2007

36. Charles Ferdinand Ramuz : "Chant de notre Rhône". 3/4.

---------------------------
Alors regarde, regarde encore, regarde tant que tu peux. Un bateau à vapeur fait une grosse fumée, le canot à rames est au milieu d'une espèce de tache d'huile. Au milieu d'une tache d'un gris luisant est le tout petit canot noir, les peupliers au bord de l'eau penchent de côté par un effet de perspective. Le lac monte devant vous comme la pente d'un pâturage, les perspectives des murs basculent, cette barque à voile est en haut d'un toit, cet autre toit pend dans rien du tout. Ici est notre Méditerranée à nous ; ici est une petite mer intérieure avant la grande. Du haut du mont et du point de cet arc qui est le point de sa concavité la plus marquée, les lieues vous sont offertes dans les trois dimensions; on peut dresser le mètre après l'avoir posé à plat ; ce n'est pas la place qui manque. L'immense ciel, qui se creuse au-dessus de vous, il se creuse aussi au-dessous de vous. C'est comme un grand oeil qui regarde et dans quoi aussi on regarde, et on cherche dedans un regard en réponse au sien sans point en trouver dans sa profondeur. (Chant de notre Rhône)