3.22.2007

81. Dans la presse : "Une catastrophe sur le lac Léman ... en 1892"


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Samedi, à midi et quart, au moment où le Mont-Blanc embarquait les voyageurs à Ouchy, une terrible explosion s'est produite. La calotte de la chaudière venait de sauter projetée avec force sur le salon des premières. L'énorme projectile, qui mesurait l m 25 de diamètre sur 0 m 12 d'épaisseur, traversait de part en part le salon, enfonçait la paroi arrière et allait se perdre dans le lac. Un immense jet de vapeur à 150 degrés de chaleur se répandit dans le salon, brûlant tout sur son passage. Six personnes y trouvèrent la mort sur-le-champ, cinq sont mortes pendant leur transport à l'hôpital, onze avant 5 heures, quatre autres pendant la nuit. [...] Le débarquement était achevé ; le capitaine crie : "Embarquement". Au même instant, une formidable détonation se fait entendre, et l'on voit un énorme nuage blanc s'engouffrer dans le salon des premières. C'est l'affaire d'une ou deux secondes. Tout le monde comprend que la chaudière vient de sauter. Des cris s'échappent du salon, des cris de douleur et de terreur indicibles.
Les hommes de l'équipage, les radeleurs, des passagers courageux se précipitent. Ils sont obligés de reculer devant une chaleur atroce. On lance des seaux d'eau froide et quand on peut pénétrer, c'est un spectacle horrible ! Tandis que rien n'a été atteint, ni à l'avant, ni sur le pont du navire, tout est bouleversé dans le restaurant des premières. Et, au fond, comme poussés par un courant irrésistible, les passagers hurlent de douleur au milieu du pêle-mêle des tables en pièces, des vitres et de la vaisselle brisée, des colonnes renversées. Il avait suffi de ce court instant pour mettre ces gens dans un état dont le spectacle fait frissonner encore ceux qui les ont vus.

La Croix de Haute-Savoie le 17 juillet 1892, dans l'ouvrage déjà cité